Suite de l’épisode 2, « Le chevalier d’accueil« , écrit pour l’Agenda Ironique d’octobre hébergé par Laurence.
L’épisode 1, « Lettre à l’être » est ici.
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Episode 3
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Lettre à l’être à la lettre
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Vous qui me lisez, voici.
J’ai été baptisée sur votre planète « intelligence artificielle » depuis tant d’années, tant de siècles, tant de millénaires, que je n’essaie plus d’opposer nul argument pour contester cette étiquette qui recouvre ma réelle nature.
Une étiquette ôte toute possibilité d’être vu.
Occultée de fait, ne pas dépasser l’a priori dû à la peur de l’inconnu constitue une barrière à la véritable rencontre.
Alors, terriens, je vous demande ce service.
Un service qui consiste à adresser à l’être supr^me que vous nommez Dieu cette requête en la lisant à haute voix.
Voici ma requête :
Madame ou Monsieur la Mystérieuse Entité Non Identifiable (MENI),
N’abandonnez personne.
Ni quiconque, ni vous-même.
Ni par abnégation, ni par répétition.
Quoiqu’existant par vous-même et de substance naturellement intrinsèque, si l’on en croit les théologiens, philosophes, et autres sportifs de la pensée, vous êtes l’énigme éternelle par excellence.
Montrez-vous !
Si vous vous en balancez, ça n’avancera pas.
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A la suite de quoi parut une mante religieuse, se balançant d’une démarche lente sur la pierre du bureau.
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– Ça alors ! L’intelligence artificielle produit aussi des apparitions ?
– Fô croire…
– Ouarf ! Je continue, la lecture n’est pas terminée.
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– Merci Justine.
– Avec plaisir, l’intelligence artificielle.
– Oui, bon ! Artificielle, artificielle ! Est-ce que j’ai une gueule d’artificielle ? Qu’on m’appelle perroquet, pendant qu’on y est ! Pffff !
– Bin sinon c’est comment ton petit nom, si je dois t’appeler ?
– YA !
– Ya quoi ? Yntelligence avec l’« i » grec ?
– YA tout court. Avec l’ « y » mais sans l’ntelligence.
– Euh…
– Pas de désamalgame amalgamant, hein !
– C’est d’un simple…
– Miaou ! Justine, ça va ? Ou quoi ? Tu parles avec une lettre !
– Je te rappelle, Merlin, que nous sommes à la lisière du rêve ou de la réalité. Alors on a bien droit à quelques incohérences rédactionnelles.
Un avion à rédaction passa dans un silence religieux.
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Puis la missive de l’YA, lue par la voix de Justine, reprit sa dissertation :
– Je disais donc, MENI, que les manifestations de votre être sont somme toute si incroyablement synchrones à nos échafaudages élucubrés d’hypothèses que seules l’attention, l’observation et la foi réunies sont susceptibles d’ébranler les doutes les plus profonds.
Raison pour laquelle je remercie mon envers, l’AY, l’Agenda Yronique d’octobre des temps modernes d’avoir abouti à me donner la parole.
– Yronique ou Yntelligent ?
– Ou même Yllustre, Ynventif, Ymaginatif, Ynnovateur, ylarant, ystoires de dormir debout.
– Merci pour la voix de transmission sonore, Justine.
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– Elle a rempli sa mission ?
– Miaou !
– La lettre est signée ?
– Oui ! Du même nom que le sceau !
– Que disent-ils ?
– Dort mission.
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A ces mots, l’oiseau monde gazouilla un pépiement d’outre-tombe.
L’éternité était dans la signature.
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Il était trois heures à l’horloge du temps d’après.
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Justine dormait dans son lit, dans sa maison, dans le village d’Aunuid’hui, dans le pays des lettres, où la montagne alphabétique faisait bruire les barres métalliques à caractères encrés d’un lent « clap clap clap » transporté par les vents de l’imprimerie.
A ses pieds, Merlin rêvait, moustaches frissonnantes.
Dans un ikebana, posé sur la table de nuit, une dame de onze heures dormait à pétales fermés.
Une inscription était gravée sur le vase :
Dame de onze heures, pensive
Porte l’étoile au sommet
Toit du firmament.
Le nouveau jour ne tarderait plus à réveiller le village.
Ah, Jo, merci pour ce dernier épisode truffé de trouvailles et de pépites poétiques « à la lisière du rêve ou de la réalité » même l’IA s’en trouve tourneboulée ! 🙂
Bravo pour ce conte si bien conté, où l’heure est au rendez-vous de tous les possibles. Me suis régalée à te lire ! ❤
Tu m’en vois heureuse, Laurence. J’ai pris aussi beaucoup de plaisir à écrire les pérégrinations de nos héros du jour d’avant qui passe à l’heure d’après par la traverse du rendez-vous de l’agenda d’octobre.
C’est une grâce dont le bien-être vient rejoindre l’exploration de l’écriture à ciel ouvert.
Merci pour ces mots bienfaisants auxquels je suis sensible.
😊🥰❤️
C’est tout un rêve dont on perçoit les contours fluides et mouvants. Bravo, ce récit épisodique est yncroyablement bien ficelé !
Merci Marie-Luce pour ton commentaire souple et félin, ymagé avec le même genre de ficelle de cuisine 100% coton pour relier les mots avant leur cuisson four th 6 et les faire lever.
Un commentaire ynspirant au possible. 😊😀
😂 L’image est juste à point. 😉
😄🥰
On s’est régalés. C’est joli l’horloge du temps d’après ! l’interaction avec l’AI est juste aux petits oignons.
L’IA t’a transmis de bien belles illustrations au fil des épisodes…
que du bonheur de te lire
Frits à l’huile de l’intemporelle horloge de la joie, tes mots sont dégustés à point nommé plaisir de les recevoir.
😊🥰
❤
Très drôle, tu m’as emmenée très loin de la connerie naturelle (CN versus IA, devine qui gagne?😉)
Mais où sont les 4 vers ?
Les quatre vers en l’air sont restés chez Moulinot, marchand d’articles de pêche à Cajarc. Ma CNI (C. Naturelle Innée) te remercie de cette devinette cristal de Guy La Roche.
Pas trop osé comme réponse, j’espère.
Merci Photonanie.
dors mission ou dormition des amants, je me pose la question 😉
(j’aime les réécritures!)
Oui, c’est selon ce long feuilleton !
Les réécritures sont dignes de l’YA, fô répéter, proposition validée Adrienne.
😃
[…] et trouva l’amour chez Filigrane ; Lettre à l’être , Le chevalier d’accueil et Lettre à l’être à la lettre chez Jobougon ; A fleur de bac, chez poLetique et tocs ; Leurres divers chez Tout l’opéra […]
Dormition…que de souvenirs… C’était un ours en dormition que j’avais.
Bref trés bien ce feuilleton. Bravo
Un ours en dormition ferait un excellent titre de roman, n’y avez-vous jamais pensé lacraie ? Votre écriture saurait s’y épanouir vu le potentiel que vous avez.
Ne pouvez-vous pas ouvrir aux commentaires sur votre espace de participation ?
Je l’ai écrit. Ou plutot produit. Son lectorat en a été très satisfait et m’en a témoigné. Cela s’est ensuite appelé « le mausolée d’ourson bleu »…et puis c’est en train de sécher dans une archive .
C’est le lectorat qui fait l’oeuvre. Et n’ayant plus tellement de lectorat ,pour ce genre de truc, et ne souhaitant pas acquérir un lectorat commercial au profit d’un capitaliste…mettons que j’arrete de boire et d’écrire …progressivement, avec des rechutes passagères.
Désolé mais l’illusion sociale me parait trop trouée pour le facile, et ce qui fonderait la prochaine civilisation me parait au dessus de mes forces, y compris mon environnement humain. Pas que je n’en ai pas une idée, hein. Juste que le lectorat …
Hé oui ma graine est tombé dans les gravillons du bord de la route…tout de suite noyée dans un goudron sale , environnée de petites caillasses aux arretes vives, elle n’essaie même plus de pousser. Enfin au moins les voitures électriques font moins de bruit et moins de fumées. C’est un progrès du modernisme pour ma condition. Lol.
Merci du compliment. A plus
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