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Archive for the ‘Extraits’ Category

« Maman l’a acheté chez Marks and Spensive. »
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« Y a-t-il une chose qu’on puisse dire en faveur de la surdité ? Une chose qui puisse la racheter ? Une plus grande acuité des autres sens ? Je ne le pense pas – pas en ce qui me concerne en tout cas. Peut-être pour Goya. J’ai lu un livre à propos de Goya qui disait que c’était sa surdité qui avait fait de lui un grand artiste. Jusqu’à l’âge de quarante-cinq ans, il était un peintre doué mais conventionnel et sans grande originalité. C’est à cette époque qu’il a contracté une mystérieuse maladie paralysante qui l’a privé de la vue, de la parole et de l’ouïe pendant plusieurs semaines. Lorsqu’il s’est rétabli, il était sourd comme un pot et allait le rester jusqu’à sa mort. Toutes ses plus grandes œuvres appartiennent à la période de sa vie où il était sourd : Les Caprices, Les Désastres de la guerre, Les Proverbes, Les Peintures noires. Toutes les œuvres sombres et cauchemardesques. Le critique en question disait que c’était comme si sa surdité avait levé un voile : lorsque, sans être distrait par tout le papotage, il voyait comment les humains se comportaient, il les voyait pour ce qu’ils étaient, violents, méchants, cyniques et fous, comme s’il assistait à un spectacle muet dans un asile d’aliénés. »
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« J’ai senti une onde de tristesse me parcourir en pensant à la fragilité de notre entreprise sur la vie, à la facilité avec laquelle les traces que nous laissons à la surface de la terre s’effacent. Tony Harrison a dit cela en quelques vers : l’ambulance, le corbillard, les commissaires-priseurs dépouillent de toute vie cette maison aimée. les trésors durement gagnés de cinquante années devenus soudain pacotille et enlevés en l’espace d’une journée. »
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« La vie en sourdine »
David Lodge
Roman Rivages
Septembre 2008

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David Lodge

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L’air insectaire s’épure à la graduation du bec verseur pendant qu’en sous-sols les poètes procèdent à la multiplication des vitamines et minéraux défossilisés par la dernière pluie.

Une séquence génétique plus loin, un bras droit sort de son corps pour s’étendre autour d’une racine d’hellébore, actionnant par hasard la circulation entre les deux zones.
Une particule un peu sonnée entrouvre une perspective arrondie comme une fibre optique 2020.
– Qu’est-ce que c’est que ce raffut, réseau tertiaire ?
L’opacité du silence alluma une bougie.
Un fil d’espéranto passant par là cru bien faire en s’attelant à la qualité d’extinction de voix du réseau. Un enrouement passager clandestin, sans doute. Le destin lui donna raison.
Bref, le décor est solidement planté au sol par quatre pilchards frais comme des ablettes, et la salaison s’affaire à l’ouvrage par l’intermittence du spectacle. La bourrasque ne pourra plus grand chose sur l’ensemble mathématique de la marche pour le climat.
– Savez-vous que la berbération de l’ombre ricoche de joie à l’évocation de ces jours micellaires, reprit la particule insonorisée depuis, pour engager l’espace cultivable à remuer l’atmosphère.
Une craquelure déplaça légèrement la mèche allumée du devoir puis, croustillant sous la crastination d’un cristal archéonéologique, elle coula de source épique sur le mur du son blanc comme un linge fraîchement mis à sécher étendu au soleil sur l’herbe du quant-à-soi.
– Pardon d’interrompre votre noctologue mais il me semble que les quatre jeudis de la semaine viennent très bien répondre d’eux-même aux interrogations écrites préparatoires sur l’étude du discours involontaire de la technologie pure, sans tenir d’un territoire archétypal quelconque, puisque suffisamment efficace et particulier.
D’où nous pouvons retirer la formul suivante :
e n’est au carré de sa ponctuation qu’à travers le barreau de paille dans l’œil de son voisin.
On demande une poutre experte à la barre !
Une recherche océanique la dégote au gouvernail corseté d’une voile gonflée surfant à la frontière de sa translucidité. Le fond sableux sourit de toutes ses dunes. C’est une grâce sans précédent. Une suite de restauration constellée comme une voûte plantaire déroule sa nuance autour de la plaine plutonienne. Les passagers du festival de Khan vous souhaitent une excellente croisière s’amuse.
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transatlantique
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Dodo-affaire-jane-eyre

Collection 10/18 poche avril 2005

Dans un monde où la littérature fait office de religion, la brigade des littéraTec élucide plagiats, vols de manuscrits et controverses shakespeariennes. L’agent Thursday Next rêve, elle, d’enquêtes explosives, quand le cruel Achéron Hadès kidnappe Jane Eyre. Dans une folle course-poursuite spatio-temporelle, la jeune détective tentera l’impossible pour sauver l’héroïne de son roman fétiche.

Aux carrefours des genres et dopée par une imagination jubilatoire, l’affaire Jane Eyre est une œuvre ébouriffée.

P 128 – 129

– Un simple malentendu, déclara-t-il, balayant mes objections d’un geste de la main. Ces abrutis à OS-13 n’ont pas la moindre idée de la valeur de mon travail.
– Qui est… ? Demandai-je, curieuse comme toujours.
– Un moyen plus miniaturisé encore de stocker l’information. J’ai réuni les meilleurs dictionnaires, glossaires et lexiques, ainsi que des études grammaticales, morphologiques et étymologiques de la langue anglaise, et j’ai encodé le tout dans l’ADN de ce ver minuscule. Je les appelle des vers hypercorrecteurs. Reconnais tout de même que c’est une réalisation extraordinaire.
– Je le reconnais. Mais comment accède-t-on à cette information ?
La mine de Mycroft s’allongea.
– Comme je l’ai déjà dit, une réalisation extraordinaire avec un petit inconvénient. Cependant, les événements se sont précipités ; quelques-uns de mes vers se sont échappés et se sont accouplés à d’autres qui comprenaient l’encodage d’ouvrages de référence historiques, biographiques et encyclopédiques ; ç’a débouché sur une nouvelle race que j’ai baptisée ver hypercorrecteurExcellenceDoublePlus. Ce sont eux, les vraies vedettes du spectacle.
Il prit une feuille de papier dans un tiroir, en arracha un bout et griffona le mot « extraordinaire » sur le morceau.
– C’est pour te donner un avant-goût de ce dont ils sont capables.
Ce disant, il fit tomber le bout de papier dans le bocal à poissons. Les vers ne perdirent pas de temps et se massèrent tout autour. Mais au lieu de manger le papier, ils se tortillèrent, excités, et explorèrent l’intrus avec, apparemment, un grand intérêt.
– J’ai eu un élevage de vers à Londres, tonton, et eux non plus n’aimaient pas le papier…
– Chut ! Murmura mon oncle, me faisant signe de me rapprocher.
Stupéfiant !
– Quoi donc ? Dis-je un peu perplexe.
Mais en voyant le visage souriant de Mycroft, je compris aussitôt que ce n’était pas lui qui avait parlé.
Etonnant ! Reprit le chuchotis. Incroyable ! Déconcertant ! Ahurissant !
Fronçant les sourcils, je regardai les vers qui, agglutinés en boule autour du morceau de papier, semblaient vibrer doucement.
Merveilleux ! Marmonnaient-ils. Remarquables ! Fantastiques !
– Alors, dit mon oncle, qu’en penses-tu ?
– Des asticots synonymiques… Tonton, tu m’épateras toujours.
Mais Mycroft était soudain redevenu sérieux.
– C’est plus qu’un simple biodictionnaire, Thursday. Ces gaillards là sont capables de faire des choses qui dépassent l’entendement.
Il ouvrit un placard et sortit un gros livre relié de cuir, avec les lettres PP gravées en or au dos. La couverture richement ornée était munie de lourds fermoirs en laiton massif. On y trouvait aussi quantité de cadrans, boutons, valves et interrupteurs. C’était impressionnant à voir, certes, mais toutes les inventions de Mycroft n’avaient pas une utilité à la mesure de leur apparence. Au début des années soixante dix, il avait fabriqué une machine extraordinairement belle qui ne faisait que prédire avec une exactitude renversante le nombre de pépins dans une orange non décortiquée.

P 128 – 129

Je me faufilai à travers la foule des Milton en direction du Chat du Cheshire. C’était facile à trouver. Au dessus de la porte, il y avait un gros chat rouge fluo sur un arbre vert fluo. Toutes les deux minutes, le néon rouge clignotait et s’éteignait, laissant le sourire du chat tout seul dans l’arbre. Alors que je traversais le hall, le son d’un orchestre de jazz parvint à mes oreilles, et je souris brièvement, reconnaissant le piano de Holroyd Wilson. C’était un enfant de Swindon. Un simple coup de fil, et il aurait pu jouer dans n’importe quel bar d’Europe, seulement il avait choisi de rester ici. Il y avait du monde, mais pas trop ; la clientèle se composait essentiellement de Milton, lesquels buvaient, plaisantaient, déploraient la Restauration et s’appelaient tous John.
Je m’approchai du bar. C’était le « happy hour », et toutes les boissons étaient à 52,5 pence.
– Bonsoir, fit le barman. Quel est le point commun entre un corbeau et un bureau ?
– Poe a écrit sur les deux ?
– Excellent, rit-il. Qu’est-ce-que je vous sers ?
– Un demi-Vorpal(1), s’il vous plaît. Mon nom est Next. Il n’y a pas quelqu’un qui m’attend ?
Le barman, qui était habillé en chapelier, désigna un box à l’autre bout de la salle, où deux hommes étaient assis à moitié dans l’ombre. Je pris mon verre et me dirigeai vers eux. Le bar était trop fréquenté pour qu’il y eût risque de grabuge. En me rapprochant, je réussis à les distinguer plus clairement.
Le plus âgé des deux était un monsieur aux cheveux gris qui devait avoir dans les soixante-quinze ans. Il portait de grosses rouflaquettes et un costume en tweed soigné avec un nœud pap en soie. Ses mains reposaient sur une canne coiffée d’une paire de gants en cuir brun ; à côté de lui, j’aperçus une casquette à la Sherlock Holmes. Son visage était d’une complexion sanguine ; à mon approche, il renversa la tête et rit comme une baleine à une remarque de son interlocuteur.
Celui-ci, un homme d’une trentaine d’années, était perché un peu nerveusement sur le bord de son siège. Il sirotait un tonic ; son complet rayé était de bonne qualité mais avait visiblement connu des jours meilleurs. Je l’avais déjà vu quelque part, mais je ne me rappelais plus où.
– Vous me cherchiez, messieurs ?
Ils se levèrent comme un seul homme. Le plus âgé parla le premier.
– Miss Next ? Enchanté de faire votre connaissance. Je suis Victor Analogy, chef des littéraTecs de Swindon. Nous nous sommes entretenus par téléphone.
Il me tendit la main.
– Ravie de vous rencontrer, monsieur.
– Et voici l’agent Bowden Cable. Vous allez faire équipe avec lui.
– C’est un grand plaisir de vous connaître, madame, dit Bowden avec emphase, une certaine gaucherie et une extrême raideur.
– On ne s’est pas déjà vus ? Demandai-je en lui serrant la main.
– Non, répondit-il catégorique. Je m’en serais souvenu.
Victor m’offrit un siège à côté de Bowden qui s’écarta en marmonnant des mots polis. Je bus une gorgée de mon cocktail. Ç’avait le goût de vieilles couvertures de cheval trempées dans de l’urine. Une explosive quinte de toux me secoua. Bowden me proposa son mouchoir.
– Vortal ? Fit Victor, haussant un sourcil. Vous n’avez peur de rien.

(1) Mot inventé par Lewis Carroll pour son poème Jabberwocky et qui signifie vif, perçant. (N.D.T.)

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