Encore une réécriture de poème célèbre, « Le buffet » d’Arthur Rimbaud.
Le café
C’est un café serré, corsé de son arôme,
Un peu traditionnel, avec un goût de pomme.
Le noir café brûlant se verse dans une tasse,
Comme une fontaine ouvrant son vieux jus de godasse.
L’écrin de porcelaine où se goûte son jus,
Enfreint de son haleine une règle disparue,
Qui veut que ce breuvage ait un parfum diffus,
En sortant de son vase au caractère obtus.
C’est pourtant son parfum qui enchante les bouches,
Réveille les endormis, comme le ferait la douche,
Préparant la journée de ceux qui l’apprécient.
Et de sa tradition il unit les familles,
Autour de ce vieux jus et son goût de myrtilles,
Que l’antique cafetière concocte avec envie.
Le buffet
C’est un large buffet sculpté ; le chêne sombre,
Très vieux, a pris cet air si bon des vieilles gens ;
Le buffet est ouvert, et verse dans son ombre
Comme un flot de vin vieux, des parfums engageants ;
Tout plein, c’est un fouillis de vieilles vieilleries,
De linges odorants et jaunes, de chiffons
De femmes ou d’enfants, de dentelles flétries,
De fichus de grand’mère où sont peints des griffons ;
– C’est là qu’on trouverait les médaillons, les mèches
De cheveux blancs ou blonds, les portraits, les fleurs sèches
Dont le parfum se mêle à des parfums de fruits.
– Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires,
Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis
Quand s’ouvrent lentement tes grandes portes noires.