Il est à claire-voie et son caillebotis aux nuances boisées mélèziennes est si doux à caresser que Marie, à chaque occasion, ne manque pas de toucher ses planchettes d’une pulpe de doigt soyeuse, suivant amoureusement les jolies veines aux dessins mystérieux.
Son imagination la surprend parfois à rêver d’histoires toutes plus fantasques les unes que les autres.
Elle se dit à chaque fois qu’elle devrait les écrire, ces histoires, quand l’œil du bois anime son regard intérieur et vient mettre en perspective une somme de scénarios rocambolesques dont seul son langage a le secret.
Toute une multitude de personnages peuple sa densité. Les ondes solaires, suivant l’heure du jour, viennent souligner certains, mettant en valeur une existence, puis une autre. Les relations se nouent entre elles, se dénouent parfois, certaines disparaissent, d’autres arrivent, et à l’intérieur tout s’organise naturellement, dans le calme le plus olympien qui soit.
Ouvragé par le fameux architecte Lord Norman Foster, l’initiation du projet, depuis sa conception jusqu’à la réalisation complète et son installation ayant pris rien moins que sept ans, il va sans dire le prix de l’objet culte qu’aujourd’hui Marie parcours des doigts avec toute la douceur chaleureuse du grain de soie dans l’inaltérabilité du plaisir à laisser voyager son âme aussi loin qu’elle puisse s’aventurer, c’est-à-dire dans l’immensité illimitée de l’inimaginable imaginaire.
Ces derniers temps, les songes délimitent un espace dans lequel gît une ombre aux contours brumeux. Certains personnages apparaissent alors plus régulièrement.
Bénédictin et Louise, deux archéologues spécialistes du nocturnisme ligneux, équipés d’outils spécifiques à la mise à jour des ombres, creusent, fouillent, dénichent et éclairent morceaux par morceaux l’ensemble de ce qui gît dans cet espace, allant de surprises en découvertes, extirpant quelques doutes au passage, récoltant ça et là pistes de recherche diverses, identification des origines de l’ombre, remontées généalogiques, signatures conditionnées sous vide, conservées soigneusement jusqu’à ouverture, dissection de nécroses et autres fioritures.
Un concept paraît émerger de la fouille.
Qui est le suivant : tout signe d’appel d’une quelconque nébulosité est à considérer.
Sans aborder la question de la considération anxieuse, mais bien plutôt du côté pittoresque et singulier, chaque nébulosité contient son réservoir de force et d’endurance tout en maintenant à perte l’énergie du dispositif déconditionnable tant qu’il perdure.
Georges Buffalo, quant à lui, recense tous les points d’intersection d’où sont issus les détails constituant ce qui pourrait être nommé la qualité particulière de l’ordinaire.
Les pores de respiration du bois en sont la première manifestation.
Certains boursouflent, d’autres cramoisissent, d’autres encore présentent une pointe blanche, laissant supposer la partie cachée de l’iceberg.
Dans le dernier cas, Georges Buffalo fait appel à la compétence de Michaëlle Long et son outil spécial, qui viendra extraire l’ensemble en l’arrachant par la pointe.
Le corps de la partie invisible est ensuite passé à l’appareil converse, qui restitue la totalité en version poétisée à souhaits, tout en laissant émerger toute la beauté de l’émanation prismatisée originelle.
Ainsi, une zébrure tournée en vers devient une marbrure diamantaire dans la boiserie du store ; une bosse de chameau, un dos de perle huîtrière ; une écaille de tortue, un liséré d’or kintsugi ; et ainsi de suite.
Michaëlle nous a confié quelques bribes de poésie, pour illustrer par l’exemple l’effet de l’appareil converse.
L’épine discrète
Pointe n’en faut,
Quand sur la pointe des pieds,
Perchée sur une bosse de chameau,
La pointe du cœur vers l’amour tournée,
Elève son chapeau,
Vers le creux du souhait,
D’aimer d’un cœur léger,
Jusqu’au dos du chameau.
Pointe sans faux,
Jusqu’à faire reculer,
A la garde des mots,
L’étendue des contrées,
Aux larmes de couteaux,
Et sortir de la roche,
La larme bleue de l’épée bleue d’Antioche.
Point trop n’en faut,
De ces rigueurs givrées,
Mais vers le sud, temps beaux,
Dans l’effort de monter,
L’escalier des oiseaux,
Pour enfin s’envoler,
Sur la pointe des mots.
Point-virgule en duo,
Calame ensorcelé,
Embrasure d’à-propos,
Et finesse évoquée,
Feront pencher l’gigot,
Vers le Saint Héritier.
Un lecteur distrait pourrait se poser la question de savoir si Marie ne serait pas le diminutif de Marie-Cyclopédie.
Un mot attentif à Marie répondrait simplement que Gustave Eiffel n’est pas le peintre de l’origine du monde.
Un autre attentif à Cyclopédie pourrait passer pour un imbécile en affirmant que le Roi n’est mage que dans le jardin d’autrui. Et pourtant, pourtant… Rester. N’avoir pour seul secours que cette confiance enracinée dans on ne sait quelle profondeur nébuleuse, au cœur d’un jardin tout aussi mystérieux, c’est dire combien « n’obtient pas la myrrhe qui veut ».
Yes ! Tout y est ! Où l’on se sent invincible d’avoir attraper en premier ces mots-ci ! Et où l’on assure leur auteur que l’usage qu’on en fera sera puissant et doux, soustrait à la convoitise et le plus respectueux qu’il soit.
🙂
Merci Lyssamara,
J’ignore ce qu’est ce « tout qui y est », mais ce que je sais, c’est que Marie, quant à elle, se tient droite et suffisamment complice avec Cyclopédie pour vous laisser opérer une soustraction nécessaire à la dimension simplifiée du store dont la vente aura lieu aux ateliers de la chapelle Saint Boum-Boum, Passage des transhumanistes, Lieu et Place Cedex 20h45 le 91 octobre prochain à 33h33.
Vous y êtes invité par la légion d’honneur, bien entendu.
En vous témoignant toute ma sympathie textuelle.
jobougon, pour vous décrire à l’usage des claviers son entière satisfaction éprouvé à la lecture de votre témoignage.
🙂
Bon jour Jo,
«L’appareil converse» ne me laisse pas indifférent sur la courbe de Lissajou qui avait une belle figure de ce temps à la Versailles loin du vénitien gondolier vague à l’âme même chaussée à la Converse à la base plantaire qui n’aurait pas dérangé un Saint Benoît bien mis sur tout rapport sauf derrière le store s’il avait clamé ce poème par effet Converse :
La Rose n’est pas du Vent
Couronnement tête à tête
L’Amour a ses feux
Grégeois bien honnêtes
La Rose de vie n’a d’yeux
Pour le cœur tout en fête
Couronnement de joyaux
Tout un monde au revers
La joie de figure fait Jéricho
La Rose se déploie à terre
Aux piétinements godillots
Couronnement au saint
Le supplicié fait acte de foi
Au sourire haillon peint
La Rose déride le linceul soie
Et les épines font un oursin
Et voilà le cher vénitien devenu saint homme éclairé par la sainte huile déposée par erreur dans le frigidaire de pains de glace de Marie qu’il devait rencontrer par hasard sur un pont par l’entremise du «Saint Héritier» …
Les yeux dans les yeux, tous deux, beaux regards dans la gondole au garage, il devait se rendre à la Villa Cyclopédie de Cyclopédie sans âge qui «raconte des histoires fumeuses» … mais l’amour est trop grand pour passer la porte du garage …
Alors, ils décidèrent de s’unir :
«Perchée sur une bosse de chameau,
La pointe du cœur vers l’amour tournée»
Max-Louis qui ne sait pas reconnaître un bois d’un autre, surtout les : «nuances boisées mélèziennes»
Max-Louis,
L’oscilloscope de la boussole est en bois cintré car la souplesse permet la courbe mélèzienne de l’orientation, on le reconnait à la longueur du poil de chameau, à celle de la perche du Nil, à la gondole abdominale et à la température des saints de glace, ma mère qui servait Pancrace disait toujours qu’ils annonçaient d’autres saints par ailleurs, ma foi… !!!
Merci d’avoir signalé la taille un poil trop grande de l’amour, Cyclopédie en sera informée par voie fluviale, ainsi le garage se hasardera peut-être à agrandir la porte… de la villa rose !
A l’unisson du Vénitien et de la dame biblique, recevez Monsieur Iotop, et coetera, et coetara…, l’assurance de… ainsi de suite jusqu’à distinguer.
Bonjour Jobougon,
Mon (beau de) jour est triste et l’échéance printanière m’inquiète -toujours-. Le courage des fleurs et de l’incendie m’abandonne. Bref, j’aurais besoin d’une autre palanquée de vos mots pour aborder avril : en vrai, je serais soulagée si vous participiez à l’agenda ironique de ce mars-ci.
Oh, bien sûr, je ne suis pas en sucre et pourrais m’en passer mais osais vous le dire, vite sans me retourner.
Bonsoir Lyssa Mara,
J’apprécierais tout autant que vous de pouvoir répondre positivement à votre demande mais, comment dire…, je ne suis pas sûre d’avoir quelque chose à écrire, ne fonctionnant que très mal sans l’impulsion du désir et de l’inspiration. Ce qui ne me permet pas de m’engager à ce sujet, tout en me laissant libre de le faire ou pas, selon ce qui viendra ou pas.
Et vous remercie infiniment d’être venue me solliciter pour participer.
Je ne sais pas si c’est qu’en vieillissant le flot se fragilise ou si au contraire il prend plus de profondeur. Il me semble que l’impulsion à faire penche de plus en plus vers son contraire en allant toujours plus loin dans l’être au monde.
En vous souhaitant une excellente bougonnerie de soirée
Jobougon, qui bougonne en gigoteuse d’hiver jusqu’à l’arrivée des saints de glace.
Oui, il s’agit bien ici et dans ce jour d’impulsion du désir, si fragile. Vous m’répondez si vraie, avancée -l’être au monde-, j’ai eu raison d’oser vous écrire cette envie. J’vous guett’rai -silencieuse parallèle- jusqu’aux bords de ce mai.
Qui sait, peut-etre qu’avril saura nous retrouver.
Bonjour Jobougon,
Mon (beau de) jour est triste et l’échéance printanière m’inquiète -toujours-. Le courage des fleurs et de l’incendie m’abandonne. Bref, j’aurais besoin d’une autre palanquée de vos mots pour aborder avril : en vrai, je serais soulagée si vous participiez à l’agenda ironique de ce mars-ci.
Oh, bien sûr, je ne suis pas en sucre et pourrais m’en passer mais osais vous le dire, vite sans me retourner.