La suite est d’une toute autre nature, elle se glisse dans les espaces intersticiels, soit entre les lignes de l’écriture, soit entre ses lettres, dans les espaces entre elles, voire même dans la marge.
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L’écriture indéfinissable demande une connaissance étroite des codages de la psyché, ce qui n’est jamais aisé, car aucun écrit nulle part n’en fait état clairement, d’autant que son impossibilité d’expression écrite est une nature première. Aussi, l’approche se fait à travers de longues paraboles, des arrondis gravitationnaires évasifs aux cursives évanescentes, tout est dans la nuée et l’indicible.
L’exercice était de style, s’y mesurer n’est pas une affaire de mots, bien qu’il passe par eux.
Il s’agit de gingembrer sans discourir creusement, tout en maintenant l’éloignement de l’extinction à distance suffisamment effective pour que la lueur ne s’emballe pas dans ses propres fonds.
La règle des trois biais redresse sa fonction première, le calcanéum au prorata de l’espièglerie repeint la façade du triturage de la conscience étoilée du processus. La lettre n’est pas une loi immuable, elle est de première intention, puis de révision, puis d’élaboration particulière, puis elle se recrée dans la spirale d’un phénomène immanent, sans jamais s’égarer dans de quelconques bases de données primaires. Bien que sa racine gréco-latine plonge au cœur de la spacio-temporalité d’Eckhart, son courant d’art fouille l’humus de la vérité comme le ferait un lombric en terre sainte.
Le cours avait repris depuis une demi-heure lorsque le courant d’air fit claquer la porte du vasistas de la création. Un étudiant, épuisé par les révisions de la veille se réveilla en sursaut. Que se passe-t-il dans l’esprit de celui qui, tout embrumé par le sommeil, vient d’être tiré du magma de l’inconscience de façon brutale et fulgurante ? En un millionnième de seconde, c’est toute une vie de pensées enchevêtrée qui se manifeste au cœur du cerveau de l’étudiant en lettres. Et puis tout retombe, recouvert du voile de l’oubli. Comment faire pour éclairer ces milli-secondes de magistralité aiguë sans avoir à se tordre le cou pour aller y voir ? Sombrer dans le trou de son tréma par l’innocence qui risque sa peau en déchirant les couches successives de la fouille archéologique de la conscience ?
Bien, allons écrire cette lettre maintenant que nous détenons les règles grammaticales, organisationnelles, contenantielles, décortico-constitutionnellement parlant.
Bonne écriture à tous les étudiants de la formation..
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Merveille de la finesse de calligraphie
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Bon jour Jo,
Dois-je prendre au pied de la lettre Gingembrer … tout est là … ce développement de ton propos sur le corps de la lettre que je pêche au vif par : « … des arrondis gravitationnaires évasifs aux cursives évanescentes, tout est dans la nuée et l’indicible » me tend vers la perplexité de la bonne mine sur la ligne qui s’éclaire par défaut de congestionner une réponse indécise … en effet, n’est pas lettre qui veut de l’apex au plein de ce corps à l’anatomie il n’y a qu’une fibre à extraire à la racine pour en délier la substance délicate et s’émouvoir telle l’Asturias à la guitare sur le parvis d’une église qui fait chair de poule à la nef de l’émotion de la calligraphie du pénitent en quête (sans la corbeille) d’une transe saine au « triturage de la conscience étoilée du processus » la lettre se grandit s’éprend à la céleste pensée d’être bien née …
Quoi qu’il en soit suis-je « embrumé par le sommeil » moi aussi quand j’entends non loin de la marge un réveil qui se sonne et le goûter de la cinquième heure m’apporte sa lettre d’invitation du réconfort … mais est-ce une lettre piégée ?
Max-Louis au bord d’une eau à l’horizon menthe à l’eau
Bon soir Max-Louis,
C’est bien connu, ce sont ceux qui en parlent le plus qui en font le moins. Mais cette fois, je me demandais comment exprimer l’inexprimable au détour d’une évocation, comment approcher au plus près le léger rien de l’indicible, sans paraître pachydermique, tel l’animal traversant le magasin de porcelaine de la subtilité de l’impossible et pourtant avec l’entrevision de ces aériens fils conducteurs de la lumière vers on ne sait quelle dimension, bref, l’impossible l’est vraiment dans le constat de la pauvreté du langage pour en faire état.
Et puis pour rebondir sur la bombe de l’horizon, menthe à l’eau, bleu ou gris perle, suivant la météo, j’avoue qu’aller y tremper mes pieds, en ces temps de proche déconfinement, est en prévision, que la brume d’un nuage blanc traverse le ciel ou pas. En évitant de faire le saut de l’hippopotame dans les méandres caillouteux suffisamment profonds, la chair de poule restera sagement dans l’église de son chant d’étoile, et le réveil, bien gardé, pourra sonner l’heure scandée d’égrennement, au plus près de sa vérité.
Mais je gazouille, je gazouille, et en vérité, cette lettre là n’avance pas d’un gramme, tant sa complexité parait, à l’humble écrivante que je suis, insurmontable, tant sa valeur est inestimable, et sa construction idéale n’en reste pas moins une nourriture céleste. Alors le réconfort de la cinquième heure… Comment dire. Est à l’apiculteur le miel de la calligraphie de ses abeilles. Le résultat de son soin attentionné à leur bonne condition.
jobougon, aux pieds de la lettre du gingembre de la création.