Agenda ironique de janvier chez carnetsparesseux
https://carnetsparesseux.wordpress.com/2019/01/03/la-recette-de-la-jumeleine/
Agenda ironique de février chez ecriturbulente
https://ecriturbulente.com/2019/02/03/fevrier-on-en-reve/
Je vais tenter de résumer brièvement (à ma façon) ce que Martine ce mois-ci nous propose de turbuler :
« La péripétie d’une extravagante jumeleine de janvier inspira à ce point (.) les moutons qu’ils se prirent à rêver d’un rêve alors qu’ils se faisaient compter par des somnambules. Ce dernier (le rêve du rêve) était absolu, rêvé par un loup en butte avec la réalité*(1), et qui rêvait la réelle réalité de plus en plus intensément ».
J’ai cru comprendre que l’agenda de février consistait, (il me semble), à écrire un rêve absolu avec pour consigne de terminer le rêve par cette citation de Groucho Marx, comédien américain faisant partie des Marx Brothers, et qui dit ceci :
« Le meilleur moyen d’éviter la chute des cheveux, c’est de faire un pas de côté. »
Rien ne disait par quelle phrase le rêve devait commencer, alors j’ai appelé la jumeleine qui a appelé Marx Groucho qui a appelé son éditeur qu’avait lu tous ses ouvrages et qui a ressorti une citation de Groucho en personne, qu’il lui a refilée, le Groucho l’a fait passer à la jumeleine, et je l’ai retrouvée sur mon bureau ce matin en me levant.
Mon rêve absolu va commencer comme ça.
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Le meilleur moyen de s’endormir est de s’imaginer qu’il est l’heure de se lever.
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Comment savoir lorsqu’un rêve rencontre le point de jonction de sa réalisation ?
Lorsque le rêve est absolu !
Autant de rêves que d’êtres vivants sur Terre me dit une petite voix au centre de mon âme.
Et s’il appartenait à chacun de le réaliser ? Et si le destin était l’outil de l’univers pour faire vivre ce rêve ?
Et si l’ensemble des rêves réalisés construisaient la réalisation d’un monde nouveau ?
Voilà bien le challenge, celui de reconnaître l’arcane du rêve absolu et de s’y atteler lorsqu’il se présente.
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C’est ce qu’ont fait Georges et Catherine.
Voyez plutôt.
Georges est entrepreneur architecte. Catherine est oiseleuse, elle élève des geais pour en faire des geais d’eau et repeupler la capitale des mots cœur complètement désertée par les eaux.
Georges envisage de construire une grotte naturelle au bord de la « Semeuse », la rivière asséchée qui traverse la capitale.
Il vient donc ce jour là repérer les tracés, les dimensions de son ouvrage, et remarque que le château qui surplombe le pont suinte.
Alors il se dit quoi, le Georges ? Il se dit, l’eau est là.
Et c’est là qu’elle arrive, la Catherine.
Elle porte un béret basque et une capuche assortie. Elle marche au milieu du cours asséché, et elle observe les traces pour en faire un récit. Elle tient une cage à la main droite, et elle écoute le bruit que fait le geai qui geint sans gélatine et sans jasmin, mais lorsque l’eau est là.
Le geai geint.
Catherine sait que l’eau est là.
Elle lève la tête.
Et tombe nez à nez sur le Georges.
Qui de surprise et ne sachant quoi dire bafouille.
G – Bonjour, vous cherchez un rêve ?
C – Comment vous savez ça vous ?
G – Parce-que vous êtes dans la même histoire que moi.
C – Ah ! Oui ! C’est vrai !
G – Vous savez comment vous y prendre ?.
C – Je ne suis pas sûre de le savoir mais j’essaie.
G – C’est déjà ça, c’est déjà ça !
C – Et vous, c’est par carnetsparesseux que vous en êtes arrivé là ?
G – Non, carnetsparesseux, c’était le mois dernier.
C – Ah ! C’est qui alors ce mois-ci ?
G – Vous n’êtes pas au courant ?
C – Non, pas encore.
G – Mais qu’est-ce que vous f..tez ici alors !
C – J’ai croisé un loup qui rêvait, il m’a demandé d’aller voir si le rêve était plus absolu ici que dans le rêve des moutons, je suis venue voir…
G – Et vous cherchez quoi ?
C – De l’eau !
G – Dans le rêve ?
C – Pas dans l’eau, le cours est à sec.
G – Avec le geai ?
C – C’est un fait !
G – Non, c’est un geai !
C – Je n’ai jamais dit le contraire.
G – Vous venez de dire que c’est un fait.
C – N’en parlons plus.
G – Vous ne trouvez pas que l’intensité est plus intense ici ?
C – Si.
G – Vous pensez que si le geai geint l’eau est là ?
C – Oui.
G – Vous avez quoi comme argument pour défendre cette théorie ?
C – C’est un geai d’eau.
G – C’est un fait !
C – C’est un fait d’eau vous voulez-dire ?
G – Je n’ai jamais dit une chose pareille.
C – Non, c’est moi qui vient de le dire.
G – Ah bon !
C – Sinon dans la vie vous faites quoi ?
G – Je suis entrepreneur architecte.
C – Vous allez construire ?
G – Une grotte naturelle, c’est un rêve.
C – Est-ce qu’il y aura de l’eau dedans ?
G – Je ne sais pas, elle n’est pas encore construite.
C – Comment vous allez choisir l’endroit ?
G – Je ne sais pas.
C – Il paraît que le rêve se renifle à mille lieues.
G – Je ne suis pas à mille lieues.
C – Non, nous sommes à la capitale des mots cœur.
G – Vous vous moquez, là.
C – Non !
G – J’ai entendu le geai geindre.
C – C’est un geai mot cœur.
G – Un geai d’eau qui se moque, les bras m’en tombent !
C – Le meilleur moyen d’éviter que les bras vous en tombent, c’est de faire un pas de côté !
G – Ah non ! Ça c’est du Groucho !
C – Amélioré.
G – Vous êtes fan ?
C – Et pas qu’un peu !
G – Alors vous savez !
C – Oui, je sais.
G – Vous avez exactement la bonne formule !
C – ‘Xactement !
G et C en chœur – Le meilleur moyen d’éviter la chute des cheveux, c’est de faire un pas de côté !
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Piou-piou
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*(1) La réalité, ce sont les moutons qui comptent les somnambules.
Oh la la ! fallait le faire ! et tu l’as fait !
Oui, accompagnée de Georges et de Catherine, tout devient tellement possible. Y compris écrire un truc entièrement turbulé artisanalement pour l’agenda écrevrillé que la fée Martine songe à nous tirer les rêves du nez comme ça pend. Honni soit qui mouchoir y pense.
Je ne sais pas pourquoi je raconte tout ça, je ne sais même pas si c’est entièrement de moi. Mon petit double intelligent et créateur est comme le chat de Baudelaire.
Le chat
I
Dans ma cervelle se promène
Ainsi qu’en son appartement,
Un beau chat, fort, doux et charmant.
Quand il miaule, on l’entend à peine,
Tant son timbre est tendre et discret ;
Mais que sa voix s’apaise ou gronde,
Elle est toujours riche et profonde.
C’est là son charme et son secret.
Cette voix, qui perle et qui filtre
Dans mon fonds le plus ténébreux,
Me remplit comme un vers nombreux
Et me réjouit comme un philtre.
Elle endort les plus cruels maux
Et contient toutes les extases ;
Pour dire les plus longues phrases,
Elle n’a pas besoin de mots.
Non, il n’est pas d’archet qui morde
Sur mon coeur, parfait instrument,
Et fasse plus royalement
Chanter sa plus vibrante corde,
Que ta voix, chat mystérieux,
Chat séraphique, chat étrange,
En qui tout est, comme en un ange,
Aussi subtil qu’harmonieux !
II
De sa fourrure blonde et brune
Sort un parfum si doux, qu’un soir
J’en fus embaumé, pour l’avoir
Caressée une fois, rien qu’une.
C’est l’esprit familier du lieu ;
Il juge, il préside, il inspire
Toutes choses dans son empire ;
Peut-être est-il fée, est-il dieu ?
Quand mes yeux, vers ce chat que j’aime
Tirés comme par un aimant
Se retournent docilement
Et que je regarde en moi-même
Je vois avec étonnement
Le feu de ses prunelles pâles,
Clairs fanaux, vivantes opales,
Qui me contemplent fixement.
Merci de ce partage je ne connaissais pas ! Baudelaire était allumé, mais quel écrivain !!! je vais regarder le mien (de chat) différemment. et remercie aussi Georges et Catherine qui se sont prêtés de bonne grâce à tes nébuleuses mais néanmoins fabuleuses créations
Geai failli succomber d’apoplexie, là, à l’instant, à retenir mon souffle jusqu’à la chute .. D’ailleurs René a trouvé un seveu dans l’eau de la sute… Il me l’a remis… zinfékoi, moi ? Je le rends au geailatineux ?
Excellent, m’âme Jo. Vous êtes une artiste !
Bizoux ❤
Ne serait-ce pas plutôt un poil de chat ? Enfin, un poil de « ça », si tu préfères, Martine.
Un poil qui fait zézayer, ou zozoter, du verbe zézaiement qui met à l’aise !
Et puis quel beau compliment qui vient me désapoplexer la gélatine de l’âme d’un coup d’un seul ! Oh merci, car venant d’une grande dame de la littérature, j’en suis toute re(co)naissante.
Et puis « pour ne pas le citer », de René Obaldia :
« Le geai gélatineux geignait dans le jasmin »
Voici, mes zinfints
Sans en avoir l’air
Le plus beau vers
De la langue française.
Ai, eu, ai, in
Le geai gélatineux geignait dans le jasmin…
Le poite aurait pu dire
Tout à son aise :
« Le geai volumineux picorait des pois fins »
Eh bien ! non, mes infints
Le poite qui a du génie
Jusque dans son délire
D’une main moite
A écrit :
« C’était l’heure divine où, sous le ciel gamin,
« Le geai gélatineux geignait dans le jasmin »
Gé, gé, gé, les gé expirent dans le ji.
Là, le geai est agi
Par le génie du poite
Du poite qui s’identifie
À l’oiseau sorti de son nid
Sorti de sa ouate.
Quel galop !
Quel train dans le soupir !
Quel élan souterrain!
Quand vous serez grinds
Mes zinfints
Et que vous aurez une petite amie anglaise
Vous pourrez murmurer
À son oreille dénaturée
Ce vers, le plus beau de la langue française
Et qui vient tout droit du gallo-romain:
« Le geai gélatineux geignait dans le jasmin. »
Admirez comme
Voyelles et consonnes sont étroitement liées
Les zunes zappuyant les zuns de leurs zailes.
Admirez aussi, mes zinfints,
Ces gé à vif,
Ces gé sans fin
Tous ces gé zingénus qui sonnent comme un glas :
Le geai géla…
« Blaise ! Trois heures de retenue.
Motif : Tape le rythme avec son soulier froid
Sur la tête nue de son voisin.
Me copierez cent fois :
« Le geai gélatineux geignait dans le jasmin. »
https://ecriturbulente.com/2019/01/06/rene-de-obaldia-le-plus-beau-vers-de-la-langue-francaise/
Il n’y a pas si longtemps, ici même 😉
C’est un juste retour de geai sur un agenda que tu présides alors… 😉
C’est enlevé, ça fait sourire,et c’est déjà beaucoup 🙂 J’adore aussi l’idée du « rêve absolu ». Bravo et merci !
Je suis bien d’accord, il faut bien reconnaître que l’idée du rêve absolu, c’est quand même quelque chose ! Je n’ai pas fini d’essayer d’en dire encore un peu plus, enfin, le chat qui zézaye dans ma cervelle m’a dit que quelqu’un lui avait dit qu’il y aurait encore de quoi dire, alors j’attends.
Merci d’être passé par là et ravie que nos deux compères vous aient fait sourire.
🙂
[…] Jobougon n’avait pas l’intention de s’en laisser compter (sur les doigts, ni taper, d’ailleurs) et quand elle s’endort, elle s’imagine qu’il est l’heure de se lever. Geai bien peur que ça bouscule les frontières et le tempo de l’évolution, c’t’affaire ! […]
ils se marrèrent et lurent beaucoup ensemble

https://fr.wikisource.org/wiki/Page%3ALewis_Caroll_-_Alice_au_pays_des_merveilles%2C_traduction_Henri_Bu%C3%A9.djvu/45
Et comme ils lurent ils eurent l’allure de rêveurs absolus.
Joyeusement décalés et pétillants de malice.
🙂
Mais que voilà un couple charmant!
Et si adorables ! Merci coquelicotetcompagnie. 🙂
Un dialogue enlevé comme dans une comédie romantique en noir et blanc, à la sauce Agenda Onirique, évidemment!
[…] Le meilleur moyen de s’endormir est de s’imaginer qu’il est l’heure de se lever. C’est chez Jobougon. […]
Que de geai que de geai … digne de Feydeau, la réplique claque joliment et le cheveu tombe au bon endroit dans la soup..eau.
L’Ornitho, vous m’épatez !
C’est geai né r’eux !
Merci à toi l’artiste.
🙂